On ne nait pas négociateur, mais on peut apprendre à négocier. La négociation est d’autant plus importante que nous sommes dépourvus d’autorité hiérarchique. Et même dans le cas où je suis chef. Or, pour apprendre à négocier, commençons par préparer une négociation. Comme préparer prend du temps, en particulier trouver un plan B, il est bon de commencer tôt, avant d’en avoir besoin. Anticiper concourt à préparer, donc à réussir la négociation.
Négociation préparée, négociation réussie.
Préparer une négociation est plus banal qu’on le croit. Voici une histoire de tous les jours décryptée sous l’angle de la négociation : je vends ma voiture d’occasion.
Je me prépare à vendre mon véhicule.
Un mois avant de repartir en France, un certain lundi, je mets ma Chevrolet Impala en vente sur Craiglist (l’équivalent du Bon Coin aux USA). J’en veux $5000. J’en ai assuré la maintenance avec un soin jaloux et quelques centaines de dollars (j’agis en bon père de famille et je m’en porte bien).
D’une part, je souhaite vendre la voiture avant de reprendre l’avion. D’autre part, si je la vends sous huit jours, je dois louer une auto pour trois semaines de voyage vers Yellowstone (un périple de 6000 km).
Appelle un chaland, dont je découvre bientôt les intentions : il veut une voiture comme mon Impala, dans ce genre de prix, pour sa fille qui fait des allers-retours à la capitale pour aller chaque jour travailler. Un achat urgent, il la veut pour samedi, impératif. Rendez-vous est pris pour demain soir, mardi.
Je prépare ma négociation.
Tout d’abord, quelles sont mes meilleures solutions de rechange ? Que faire si je me retrouve au pied de l’avion avec mon Impala ? Je cherche le long de la route principale quelque mandataire qui aurait eu à traiter un cas similaire au mien et, rapidement, j’en trouve un qui, moyennant $500, se charge de vendre ma voiture et me glisse : de toutes façons, n’importe qui achète une Chevrolet Impala, elle sera partie sous quinzaine. Conclusion : au pire, je pars à Yellowstone avec notre Impala et je la laisse à l’aimable commerçant, j’y perds certes sa commission mais j’y gagne le coût d’une location de voiture pour 3 semaines.
Et puis, quelles sont ses solutions de rechange, à mon prospecteur ? Acheter une autre voiture du même genre dans un rayon de 100 km. Existe-t-elle ? Je me reconnecte à Craiglist, cette fois en acheteur et… pas de voiture similaire à vendre dans ledit rayon. Conclusion : si mon prospecteur confirme son impératif de samedi, la négociation est mal emmanchée pour lui : pour sa fille, c’est ma voiture ou rien.
Le soir vient, mon prospect vient accompagné, prend connaissance de la voiture, fait un tour, revient et me confirme son intérêt. Je lui vante ma gestion de bon père de famille et produis les factures d’entretien. En a-t-il toujours besoin pour samedi ? Oui, certes. Il m’en propose $3500. Je lui réponds : OK, dans quatre semaines, lors de notre retour de Yellowstone. Hum, ça ne m’arrange pas ! Eh bien, pourquoi pas $4900, j’aurai fait le plein vendredi et vous en prenez possession samedi.
Ainsi fut fait.
Préparer une négociation prend du temps
Une négociation réussie, c’est un long-lead item , c’est-à-dire une pièce qui prend du temps à être livrée. C’est pourquoi la « commander avant d’en avoir besoin » est une bonne idée.
Rappelons-nous : pas d’alternative, pas de négociation. Aussi nous faut-il rechercher pour nous-même un plan B, un vrai. Ça peut prendre un certain temps.
Remplir la grille de négociation
Préparer une négociation, c’est se lancer dans une découverte de l’autre et de moi-même :
- Quels sont mes objectifs ? Quels sont ses objectifs ?
- Et mes valeurs ? Et ses valeurs ?
- Quelles sont mes contraintes ? Quelles sont ses contraintes ?
- Quels sont mes seuils ? Quels sont ses seuils ?
- Quelle est ma meilleure solution de rechange ? Quelle est sa meilleure solution de rechange ?
Absence de plan B manifeste ? fin immédiate de la négociation !
Au moment où l’un des partenaires de la négociation se rend compte que son vis-à-vis est dépourvu de solution de rechange, la négociation stoppe.
S’il n’a pas de meilleure solution que de s’entendre avec moi, mon partenaire de négociation pourrait bluffer, c’est humain. Malgré tout, si je détecte son vide de plan B, c’est bel et bien à mes conditions que le deal se conclura, comme dans l’exemple ci-dessus.
Analyser les parties prenantes prépare la négociation à venir !
Préparer une négociation prend du temps. Donc, il est sage de commencer avant d’en avoir besoin.
Or, dans Initiative101, nous débutons l’approche par la rencontre des parties prenantes, l’écoute au moyen des trois questions :
- Que faites-vous ?
- Qu’est-ce qui est difficile ?
- Avec qui travaillez-vous ?
En réponse à nos questions, les parties prenantes nous éclairent :
- quels sont leurs objectifs généraux,
- quelles sont leurs valeurs,
- leurs contraintes, ce qu’elles sont.
Clairement, rencontrer les parties prenantes nous aide à remplir la grille de leur côté. Ainsi, nous voilà préparés à négocier avec elles.
Alors, il nous reste à clarifier notre côté de la grille.
Pour aller plus loin dans la négociation
Je recommande d’écouter Laurent Combalbert dans Comment bien négocier face à son patron, sa femme ou ses enfants.
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