Remplacer le papier par une tablette, l’expérience de deux installateurs d’électro-ménager.

Et vous, jeunes gens, à quelle initiative pensez-vous ? Obtenir tel résultat business en remplaçant les papiers par une tablette. Le projet a l’air clair. Faisable, même. Manque une raison business pour compléter l’initiative : pourquoi ferait-on cela ? Quel résultat attend-on ? Et qui l’attend ?

Papier, puis tablette, puis retour au papier

Cet après-midi, deux jeunes gens nous livrent et installent la plaque à induction que nous avons achetée samedi. Nous sommes leur dernière mission pour la journée, ils prennent leur temps et nous sirotons ensemble un café.

• Et vous, Monsieur, qu’est-ce que vous faites ?
• Eh bien, j’ai longtemps travaillé comme chef de projet dans le domaine informatique et depuis 7 ans je m’occupe des utilisateurs, afin qu’ils utilisent.
• Ah ? C’est vrai que c’est utile.
• Oui, d’autant que je me suis aperçu que très peu d’utilisateurs utilisent effectivement les applications que leur livre l’informatique. Ce n’est pas général, peut-être. En tout cas, j’ai commencé à le constater lorsque j’ai posé la question : qui utilise ce que nous avons livré il y a 6 mois ?
• Ça me rappelle, nous, il y a deux ans, ils ont voulu nous remplacer le papier par une tablette. Ils ont commencé et puis ça n’était pas probant, alors ils ont arrêté, nous avons repris le papier. C’est pour les bons de livraison. Tenez, signez là, s’il vous plait, sur les deux exemplaires. Un pour vous, un pour nous.
• Qu’est-ce qui s’est passé, pour ce projet ?
• C’était pas mal, leur idée. La tablette servait à organiser notre tournée, elle prenait nos rendez-vous en tenant compte des contraintes des clients. Mais elle remplaçait complètement le papier, le client signait sur la tablette directement. Du coup, avec une personne agée pas habituée à l’informatique, c’était délicat. Et puis, elle ne pouvait pas avoir de facture, parce que la facture était envoyée par email et elle n’avait pas d’email.
• Alors ?
• Alors, ils ont préféré retirer les tablettes et nous sommes revenus au papier. Ils parlent de refaire un projet. Ça sera mieux pensé cette fois-ci.
• Et au fait, remplacer le papier par une tablette, pourquoi se sont-ils lancé là-dedans ?
• Nous ne savons pas.

Bilan ADKAR®

Awareness : néant. Nos deux jeunes gens ignorent pourquoi le projet fut lancé. Et aussi, qui le prend sur ses épaules. Est-ce un projet de l’informatique ? une initiative du directeur des opérations ?

Desire : plutôt bien. Nos livreurs ont conscience de ce qu’ils y gagnent, et ce qu’implique pour eux de travailler avec des tablettes. En même temps, savent-ils ce que l’entreprise y gagne ? C’est incertain.

Knowledge : OK. Ils ont l’air dégourdis et connaissent une limite du produit, l’absence de facture papier pour les clients sans email.

Ability : difficile d’en juger. Comment géraient-ils le cas du client dépourvu d’email ? Quel soutien recevaient-ils de leur superviseur ? de la hot-line ?

Reinforcement : embryonnaire, voire nul. Pas de retour d’expérience de ce déploiement foireux, pas de prise de parole du sponsor, si tant est qu’il y en ait un. Embryonnaire parce que le lancement d’une nouvelle initiative, remplacer le papier par une tablette bis, ou Tablette, le Retour, pourrait débuter par un retour d’expérience, justement.

Qu’est-ce que ça me fait ?

Nos deux amis sont sereins. Pas de regrets, pas d’espoirs non plus. Une indifférence placide.

Quant à moi, je suis étonné de la facilité que notre société a de commencer des projets et de les stopper comme si ça n’était pas grave. Je généralise à outrance. J’entends parfois : « Allons, gaspiller du temps et de l’énergie de beaucoup de gens, bof, ça arrive. Faire et défaire, c’est toujours travailler. » En ce qui me concerne, je ne m’y résous pas. Ça n’est pas comme si nous n’avions pas d’autres problèmes à régler. Il y a trop de choses à faire en ce monde ici et maintenant pour paralyser le temps et emboliser l’énergie de ceux et celles qui pourraient s’y atteler.

Qu’est-ce que j’en fais ?

Pour l’avoir vu à l’oeuvre, je suis convaincu de la puissance de l’approche Initiative101. J’ai envie de proposer les services d’Initiative101, mais à qui ? 

• à l’informatique ?
• au directeur des opérations ?
• aux syndicalistes ?

ADKAR® et les termes « Awareness Desire Knowledge Ability Reinforcement » sont des modèles déposés de la société Prosci située à Loveland/Fort Collins, Colorado, USA.